Wash de Margaret Wrinkle

Dans les années 1820 aux Etats-Unis, bien qu’une nouvelle vague s’élève pour protester contre l’esclavagisme, la traite des Noirs d’Afrique et d’ailleurs reste un commerce prospère. Wash est né sur le sol américain mais ses parents sont Africains. En grandissant, il devient un grand gaillard noir ébène comme on en achète rarement : les colons se méfient de leurs croyances encore vivaces, leur regard fuyant et leur vaudou maléfique. Richardson a acheté sa mère Mena sur une impulsion : un regard d’elle et il s’est surpris à faire une offre. Mais c’est bien elle qui l’a choisi, consciente du secret qui grandirait en elle. Wash n’est pas un esclave comme les autres : il est plus imprévisible encore, il a toujours vécu à l’écart, mais c’est surtout son « travail » qui diffère… Pour se faire de l’argent, Richardson l’utilise comme « reproducteur », conscient de la lignée d’esclaves solides que promet un tel géniteur. Aussi incroyable et inconcevable que cela paraisse, Margaret Wrinkle met le doigt sur une pratique méconnue qui a bien existé.

Le récit entremêle des personnages qui gravitent autour de Wash : sa mère Mena, son maître Richardson, mais aussi le vieux Thompson et ses fils violents, Rufus le forgeron africain et Pallas, l’étrange guérisseuse métisse qui pourra peut-être apaiser Wash.

En cours de lecture, je me suis un peu ennuyée, l’enchaînement des points de vue des uns et des autres me laissant sceptique quant à la suite du récit. Mais heureusement ce dernier regagne de l’intérêt avec l’histoire de Pallas et Wash tant vantée sur la quatrième de couverture. Dommage qu’elle mette tant de temps à s’installer, car on a bien compris l’enfance particulière du anti-héros colérique (à juste titre) ; et bien que le récit de Richardson permette de rappeler le contexte historique et les dilemmes moraux de l’époque, il aurait peut-être fallu revoir la construction du récit qui s’essouffle en cours de route et risque de perdre quelques lecteurs.

Cela étant dit, Wash reste un texte fort, dont le style ne m’a pas particulièrement plu donc, mais dont le fonds a réussi à susciter ma curiosité. L’injustice du sort de ce jeune homme, l’esclavagisme qui regagne du souffle après une période charnière où certains noirs avaient droit à une relative « liberté », l’importance des croyances et le respect des traditions exilées en terre américaine : tout ceci participe à faire de ce roman choral une bonne découverte.

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